Le jeudi, c'est citation avec Chiffonnette
image du Net - arrosoir et pivoines James Guilliam
Entre les Plumes en O et les Plumes en P, je m'installe dans la fin du 19e et le début du 20e siècles. J'avais découvert, la semaine dernière, que Octave Mirbeau était un ami intime de Claude Monet.
Après l'ombrelle de Syl, les pivoines d'Asphodèle ont pris le relais. Curieuse et appliquée (!) je consulte M. "je sais tout", et que lis-je ? Octave Mirbeau (encore lui !) a écrit "Le jardin des supplices" paru en 1899 aux Editions Charpentier-Fasquelle. Ce livre est sorti en collection Folio classique chez Gallimard en 2006.
Je n'ai pas (encore) lu ce livre -je vais le commander- sauf quelques passages sur le e-book à télécharger gratuitement sur Internet. Serais-je prête à devenir une lectrice assidue ou testeuse de liseuse, Kobo de la Fnac ou le Kindle d'Amazon ou le Reader de Sony, comme pour mon MP3 (mon ancienne Tribu se souvient de cette aventure !)
"Le jardin des supplices n'est pas seulement le catalogue de toutes les perversions dans lesquelles s'est complu l'imaginaire de 1900. L'ouvrage exprime aussi l'ambiguïté de l'attitude d'un Européen libéral, mais Européen avant tout, devant le colonialisme et ce qu'on n'appelait pas encore le Tiers Monde. Pour Mirbeau, la Chine est le lieu des plaisirs mortels et, par leur système pénal et l'invraisemblable raffinement de leur cruauté, les Chinois ne peuvent être à ses yeux que des barbaries : Emmannuelle sur fond de guerre du Viêt-Nam, comme l'écrit Michel Delon. Mais les Chinois vivent dans une société plus solidaire et matériellement moins asservie que la nôtre. Et surtout ils sont d'admirables artistes. Tel est le paradoxe de la Chine : un jardin de supplices mais aussi les plus belles porcelaines, les plus beaux bronzes que l'on ait jamais faits. Voici donc les Barbares à peau jaune dont les civilisés d'Europe à peau blanche violent le sol. Nous sommes toujours les mêmes sauvages, les mêmes ennemis de la beauté." (cf Google)
la citation est un peu longue mais ne supportait pas de coupure...
... "Tout, aussi, semblait avoir été disposé, par la munificence de la nature, pour le triomphe des pivoines. Sur les pentes douces, semées, en guise de gazon, d'aspérules odorantes et de crucianelles roses, du rose passé des vieilles soies, des pivoines, des champs de pivoines arborescentes déroulaient de somptueux tapis.
Près de nous, il y en avait d'isolées, qui nous tendaient d'immenses calices rouges, noirs, cuivrés, orangés, pourprés. D'autres, idéalement pures, offraient les plus virginales nuances du rose et du blanc. Réunies en foule chatoyante, ou bien solitaires au bord de l'allée, méditatives au pied des arbres, amoureuses le long des massifs, les pivoines étaient bien réellement les fées, les reines miraculeuses de ce miraculeux jardin.
Partout où le regard se posait, il rencontrait une pivoine. Sur les ponts de pierre, entièrement recouverts de plantes saxatiles et qui, de leurs arches audacieuses, relient les masses de rochers et font communiquer entre eux les kiosques, les pivoines passaient, pareilles à une foule en fête. Leur procession brillante ascensionnait les tertres, autour desquels montent, se croisent, s'enchevêtrent les allées et les sentes que bordent de menus fusains argentés et des troènes taillés en haies. J'admirai un monticule où, sur des murs très bas, très blancs, construits en colimaçon, s'étendaient, protégées par des nattes, les plus précieuses espèces de pivoines, que d'habiles artistes avaient assouplies aux formes multiples de l'espalier.
Dans l'intervalle de ces murs, des pivoines immémoriales, en boule sur de hautes tiges nues, s'espaçaient, dans des caisses carrées. Et le sommet se couronnait de touffes épaisses, de libres buissons de la plante sacrée dont la floraison, si éphémère en Europe, se succède ici durant toutes les saisons. Et, à ma droite, à ma gauche, toutes proches de moi, ou bien perdues dans les perspectives lointaines, c'étaient encore, c'étaient toujours des pivoines, des pivoines, des pivoines"... "Le jardin des supplices" d'Octave Mirbeau